Philosophie / Démarche personnelle de projet

Paysagiste ?

En fonction du lieu et du type d'intervention pour laquelle une collectivité sollicite une compétence en paysage, les enjeux de la démarche de projet n'engagent pas le paysagiste concepteur de la même manière. En langue anglaise, la façon de nommer la profession permet d'emblée de mieux comprendre l'échelle de prédilection de chacun (au gardendesigner le dessin des parcs et jardins, au landscape architect celui de l'aménagement des espaces publics urbains, des quartiers et des villes, au landscape planner les études et les projets de territoire) … quand en français toutes ces compétences ne sont désignées que par un seul terme : paysagiste.

Contribution aux projets urbains - équipes pluridisciplinaires

Un projet d'aménagement urbain est conçu par une équipe pluridisciplinaire associant diverses compétences dont un paysagiste. Dans ces projets où les moyens mis en œuvre pour transformer l'espace peuvent être considérables, ma priorité est de contribuer aux réflexions communes par une attention à la qualité des structures végétales et des espaces non-bâtis existants, à la continuité et au confort des itinéraires mode doux (piétons-cycles), au circuit de l'eau, à la biodiversité urbaine, ainsi qu'à la durabilité du projet (choix de végétaux adaptés, facilité d'entretien).

Projets et études en milieu peu ou non-urbanisé

Le projet de paysage rencontre selon moi la pleine mesure de ses enjeux dans les études et les projets situés dans des lieux peu ou non-urbanisés (espace péri-urbain, milieu rural, littoral ou espaces préservés), pour lesquels le paysagiste est le principal interlocuteur de la maitrise d'ouvrage. L'échelle du site, les usages, historiques et actuels, qui ont façonné et qui continuent à façonner le paysage non-bâti, appellent une démarche de projet dont le résultat ne doit être ni un décor* ni une décoration** mais bien un paysage.
Pour mener à bien cette démarche de projet, en plus des réunions de travail et des documents mis à disposition par la maitrise d'ouvrage, un temps conséquent passé sur place permet à la fois de bien connaître le territoire et ses alentours, de le parcourir à pied et de le dessiner. C'est également l'occasion de rencontrer fortuitement des habitants ou des usagers, dont les propos et les regards contribuent à nourrir le diagnostic et par conséquent le projet.

Le projet de paysage en milieu peu ou pas urbanisé n'est pas un espace créé d'un coup, ou par une seule personne. Il nécessite un diagnostic complet et partagé, la rencontre avec un maximum d'acteurs locaux, et la conscience d'un processus de mise en œuvre à la fois modeste par ses moyens et ambitieux par ses objectifs.

Cet urbanisme de l'espace non-bâti, que l'on pourrait appeler projet-processus*** par opposition à un projet-objet, peut alors s'intégrer durablement dans son environnement. Il initie à la fois de grandes orientations directrices et quelques actions simples et immédiates, et il est en mesure d'accepter l'évolution du projet à long terme.

* un décor serait un pastiche de paysages locaux, copiant des objets typiques ou vernaculaires pour créer une scénographie artificielle sans mobiliser les usages réels qui créent naturellement les paysages recherchés.
** une décoration serait la mise en place d'un espace d'agrément, composé d'essences végétales et de mobiliers choisis pour « faire beau », et entretenu comme tel, en rupture avec le contexte urbain et paysager alentour.
*** expression empruntée à Philippe Panerai.